L’étude ici proposée repose sur un corpus extrêmement récent, c;;est-à-dire exclusivement composé d’œuvres du XXIème siècle, allant de 2009 à 2011 pour la plus récente. Ces quatre œuvres font intégralement partie du corpus de la littérature québécoise. Dans La mémoire de Québec : les fossoyeurs d’André Lamontagne, professeur en littérature française à l’Université de Colombie-Britannique, a été publié en 2010 aux éditions David. André Lamontagne nous dépeint l’histoire d’un journaliste établi à Vancouver qui profite d’un séjour à Québec pour se pencher sur le passé de sa voisine chinoise, Rachel, et de ce fait, sur les rituels mortuaires chinois. Avec plusieurs personnages en parallèle, André Lamontagne fait ressurgir le passé de Québec et des incendies qui ont marqué la ville et dont les peintures de Joseph Légaré au milieu du XIXème siècle ont préservé la mémoire. Jocelyne Saucier, dans Il pleuvait des oiseaux, publié aux éditions XYZ en 2011, nous ramène aux grands feux du nord de l’Ontario au début du XXème siècle, le plus connu étant sans doute le grand feu de Matheson en 1916. Ici aussi, c’est à travers la peinture de feu Boychuck que nous redécouvrons le passé, grâce à la volonté d’une journaliste de gratter à la surface de ce pan méconnu de l’Histoire de l’Ontario. La journaliste découvrira bien assez tôt que le prix à payer sera l’exil hors de cette société, pour embrasser une temporalité passée. Kim Thúy, dans Ru, roman que l’on pourrait presque croire autobiographique, revient sur l’histoire des boat people à travers Nguyen An Tịnh, le personnage principal, et son arrivée fortuite au Canada francophone. En dernier lieu, Guyana, d’Élise Turcotte, a été publié aux éditions Leméac en 2011. Guyana se partage entre deux spatialités et deux temporalités parallèles, le présent à Montréal d’un côté, le massacre de Jonestown en 1978 de l’autre. Le meurtre de Kimi, la coiffeuse d’Ana et de son fils, déclenche le début d’une quête effrénée de la vérité sur les raisons de sa mort. Tous ces romans sont ainsi caractérisés par leur côté métahistorique, intégrant un pan de l’Histoire dans leur narration. C’est ainsi de l’histoire de l’Histoire que témoignent ces différents romans, ce qui suppose deux plans historiques qui s’entrelacent. On retrouve le massacre de Jonestown chez Élise Turcotte, le passé des rituels chinois chez André Lamontagne, les grands feux du début du XXème siècle chez Jocelyne Saucier et l’histoire des boat people chez Kim Thúy. Tous ces romans sont partagés entre le présent et un autre temps, qui appartient à l’Histoire, à une communauté. On oppose ici deux temporalités : la temporalité historique et celle de la fiction. Les différents niveaux de la diégèse semblent ainsi s’entrelacer, peut-être même jusqu’au point de ne faire qu’un. C’est là l’aboutissement de notre réflexion. Pourquoi l’auteur n’a-t-il pas choisi d’écrire deux romans? Ces deux temporalités sont-elles nécessaires l’une pour l’autre? Comment interagissent-elles dans ces romans métahistoriques? Peut-on trouver l’intersection même des deux temporalités?
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Le roman québécois contemporain et sa double structure temporelle